La réponse était attendue avec impatience et on l’imagine, un peu d’anxiété du côté du Groenland. Malheureusement, elle est négative. La CONCACAF, Confédération de football d’Amérique du Nord, d’Amérique centrale et des Caraïbes, a rejeté à l’unanimité la demande d’adhésion de la KAK (fédération groenlandaise de football).
On le sait, celle-ci revêtait une grande importance aux yeux des dirigeants et de la population du territoire danois autonome, qui compte parmi les plus forts taux de licenciés au monde, à savoir 10% de ses 57 000 habitants. Le président de la fédération Kenneth Kleist, avec qui nous avions échangé en février dernier, explique dans un communiqué : « nous avons reçu une brève lettre du secrétaire général Philippe Moggio rejetant notre demande d’adhésion à la Concacaf en tant que 42e membre. » Pouvait-il en être autrement, alors que plusieurs rendez-vous demandés par la KAK auprès de la CONCACAF avaient été repoussés, décalés…

Le coup est rude. Sur une île soumise aux conditions climatiques difficiles et gangrénée par la misère sociale, le football est un espoir. Le taux de suicide est lui aussi l’un des plus élevés au monde, notamment chez les jeunes, et tous comptaient sur une participation à des compétitions officielles pour leur permettre de rêver à nouveau. « Pour l’instant, ils n’ont rien à attendre. C’est donc très important pour nous. déclarait à The Athletic l’entraîneur de l’équipe nationale masculine Morten Rutkjaer, en février. C’est aussi important d’être membre de la Concacaf car les jeunes auront un rêve, celui de faire partie de l’équipe nationale et de jouer contre tous ces pays. »
Quand The Athletic demandait à Kleist si le contexte politique et le souhait de Donald Trump d’acheter le Groenland pouvait influencer le dossier, le président de la fédération pesait le pour et le contre. « C’est très difficile de répondre à cette question, car je pense que, d’une certaine manière, cela nuit un peu à notre cause, car de nombreux journalistes du monde du football interrogent la Concacaf et nous-mêmes sur Trump. Mais globalement, je pense que c’est une bonne chose pour nous, car tout le monde parle de l’avenir du Groenland. » Ceux qui ont aujourd’hui réponse à cette question, ne la donneront sans doute pas.

Alors maintenant, quel avenir pour le foot groenlandais ? La KAK s’évertue à améliorer infrastructures, encadrement et performances sportives, comme en atteste encore le match récemment disputé au Danemark, face à Silkeborg, sur la pelouse du club de Superliga (1-1). Mais l’horizon s’obscurcit soudain et la porte de l’UEFA ne devrait pas s’ouvrir pour le moment. « Nous allons utiliser les prochaines 24 heures pour évaluer la situation et discuter en interne de la manière dont nous allons traiter cette décision », explique le communiqué. […] Cela ne rend pas le football accessible à tous à l’échelle mondiale et cela démontre que les petites nations rencontrent d’énormes difficultés pour obtenir l’autorisation de jouer sous leur propre drapeau. »
Et ça, comme le souligne Kenneth Kleist : « ce n’est pas une victoire pour la démocratie du football. »
Photos : Instagram Morten Rutkjaer