Mercredi 2 août 2023, une date inscrite à jamais dans les livres d’histoire féroïen. Ce soir-là, le KÍ Klaksvík s’est qualifié pour le troisième tour qualificatif de Ligue des Champions, une première pour un club l’archipel. Récit d’une soirée qui restera gravée dans les mémoires de tous… pour le moment.

Après un succès totalement dingue sur la pelouse du club hongrois Ferencváros, nous nous sommes dits que nous tenions déjà le plus gros succès d’un club féroïen en coupe européenne. Sans se douter un instant, que Klaksvík ne venait pas d’écrire la plus belle page de l’histoire de son archipel, mais le début d’un long chapitre. En effet, suite à un match aller au Við Djúpumýrar qui s’est soldé par un score nul (0-0) où Häcken s’est vu refuser deux buts pour hors-jeu, le petit club d’une ville d’à peine 5 000 habitants n’était pas en position favorable dans ce match retour à l’extérieur.

Un scénario surréaliste

Alors que le jeu était logiquement dicté par le club suédois, Árni Frederiksberg, servit par Claes Kronberg, ouvre le score, et par la même occasion, inscrit son troisième but de la compétition dans un angle relativement fermé. Le scénario face à Ferencváros revient alors dans la tête de tous les spectateurs, mais aussi des joueurs. Ainsi, Häcken ne se laisse pas surprendre et égalise sept minutes plus tard, par l’intermédiaire de l’expérimenté Tobias Sana (34 ans), qui envoie une frappe surpuissante aux abords de la surface de réparation. Au retour des vestiaires, la première occasion est à mettre sur le compte des féroïens avec un Luc Kassi bien servit par Jóannes Danielsen en retrait, mais qui ne trouve pas les filets. Quelques instants plus tard, ce sont les locaux qui prennent l’avantage sur une tête de la nouvelle recrue Amor Layouni devant une défense passive. Vous connaissez le dicton “il ne faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué” ? Et bien ce soir-là, il a pris tout son sens lorsqu’Árni Frederiksberg s’offre un doublé sur un coup franc direct qui contourne le mur, bien aidé par une vilaine faute de main de Peter Abrahamsson. Dans les deux dernières minutes de la rencontre, c’est tout un stade qui eut le souffle coupé, puisque Klaksvík était à deux doigts de prendre l’avantage, mais voit son ballon heurter la barre transversale.

Les deux formations sont incapables de se départager, il faut alors disputer les prolongations. C’est avant la mi-temps qu’Ibrahim Sadiq redonne l’avantage à son équipe en reprenant le cuir devant le gardien adverse. On aurait pu croire que cela suffirait, qu’une équipe aussi supérieure ne pouvait pas encore flancher. Et pourtant, le KÍ Klaksvík avait décidément rendez-vous avec son destin. À la 109e minute le club de l’archipel égalise, à nouveau, bien aidé par Peter Abrahamsson qui marque contre son camp. Direction les tirs au but.

Encore une fois, les joueurs d’Häcken ne peuvent s’en prendre qu’à eux-mêmes. Alors que Mikkel Rygaard manque son pénalty, Sivert Gussiås ne cadre pas non plus et rebat les cartes. Cependant, le club suédois manque un deuxième tir au but consécutif, arrêté par Jonatan Johansson. Le club féringien est donc maître de son destin. Qui d’autre que l’expérimenté Vegard Forren, 35 ans et ex-international norvégien, pour résister à la pression ? Ce dernier s’élance et conclut d’un tir puissant, plein centre. Ça y est. C’est fait. Le KÍ Klaksvík se qualifie pour le troisième tour de Ligue des Champions, et assure, au minimum, une phase de groupe pour la première fois de son histoire et de celle d’un club des Iles Féroé.

Des joueurs qui ne vivent pas du football

Nous n’allons surement pas vous apprendre grand-chose puisque nous l’avons mentionné sur nos réseaux sociaux, et que certains médias ont repris ces informations, mais les joueurs de cette équipe ont en grande majorité un travail à côté. Árni Frederiksberg, le meilleur buteur de cette formation en coupe européenne, est le directeur général d’une entreprise importatrice de produits alimentaires. D’autres sont machinistes, étudiants, travaillent sur des bateaux, à l’usine de poisson du village ou électriciens. Et parmi ces derniers, se trouve Jonatan Johansson, qui a une histoire encore plus rocambolesque que celles citées précédemment. Il y a encore trois mois, le gardien de but du KÍ Klaksvík jouaient au football en tant que … défenseur central en cinquième division norvégienne ! Lassé d’être le dernier rempart, ce dernier a décidé de s’improviser dans un nouveau rôle avec des amis. Mais finalement, lorsque Magne Hoseth, l’entraîneur de Klaksvík, lui a envoyé un message sur Facebook pour lui demander si ça l’intéresserait de retourner dans les cages étant donné que leur gardien titulaire s’était déchiré les ligaments, il n’a pas hésité. La suite de l’histoire, nous la connaissons tous désormais.

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