Toujours dans l’optique de mettre en avant le parcours des Français évoluant dans nos pays nordiques à travers notre page French Touch, nous vous proposons aujourd’hui de retrouver celui d’Aurelien Norest qui évolue au Umeå FC en 3e division suédoise au poste de défenseur central où il joue actuellement la montée.

Aurelien nous a fait le plaisir d’accepter de parler de son parcours footballistique, et de son expérience de footballeur français ayant décroché un contrat professionnel à l’étranger. Au sein d’un parcours atypique d’un footballeur qui a toujours privilégié le collectif, et qui en a été récompensé, en ayant été capitaine dans toutes les équipes où il est passé.

Au programme de cette entrevue : détections de jeunes, problème de taille et de la stigmatisation sur ce facteur au poste de défenseur central, sport universitaire aux E-U, job en parallèle d’être footballeur, conseils et football en Islande et Suède :

Bonjour Aurelien Norest, peux-tu te présenter et nous parler de tes débuts footballistiques en France jusqu’à ton départ à l’étranger ?

Bonjour, donc je m’appelle Aurelien Norest, je viens d’avoir 27 ans et je viens des petits quartiers de la région Parisienne à Cergy-Pontoise dans le 95, dans une famille qui n’a jamais joué au football. J’ai commencé le football à l’âge de 5 ans, dans une ville située juste à côté, à l’AS Saint-Ouen-l’Aumône, le club qui était le plus intéressant pour mes parents pour m’inscrire au football. Ils m’ont lancé là-dedans et cela s’est bien passé, j’ai toujours été dans les plus hautes équipes de mes catégories. Puis très vite arrivé à l’âge où on se positionne sur le terrain et où on donne des rôles aux joueurs, j’ai été positionné comme défenseur central et comme capitaine de l’équipe depuis mes 9 ans.

J’ai gravi les échelons, cela se passait très bien, on jouait régulièrement contre le PSG et participait à de nombreux tournois avec de belles générations de joueurs. Et vers mes 12 ans, j’ai été de nombreuses fois demandés par le PSG pour y faire des essais. Mais ayant toujours été un joueur absolument orienté vers l’équipe dès le plus jeune âge, où j’organisais les équipes et donner des instructions, alors que tous les mecs ce qu’ils voulaient c’était marquer un but, au final c’était eux qui gagnaient la place et moi je retournais dans le même club.

J’ai continué les détections, j’ai même été jusqu’à l’avant-dernier tour des détections à Clairefontaine, dans les 40 derniers sur toute la France. Encore une fois très bonne détection, tous les coachs me voyaient passer, mais de nouveau résultat des comptes pas de passage. Arrivé à mes 16 ans me jugeant petit pour ce poste, à l’entrainement ils essayaient de me voir milieu défensif ou défenseur droit, mais au final on ne m’a jamais changé de poste.

« Cela a été le début de la réalisation que, je vais jouer au foot car c’est une passion et j’aime cela, mais je ne me voyais pas faire une carrière professionnelle. »

J’ai ensuite subi des blessures de croissance, ce que beaucoup de footballeurs ont, et cela durant 1 an et demi. Après cela, encore d’autres blessures, cela a été un peu un arrêt. Quand tu es gosse que tu vois que le PSG et Lorient ont des vues sur toi et qu’au final tu as des blessures, tu réalises que bien sûr il y a d’autres jeunes, ça te fait une cassure. Cela a été le début de la réalisation que, je vais jouer au foot car c’est une passion et j’aime cela, mais je ne me voyais pas faire une carrière professionnelle. Peut-être jouer avec la CFA2 de Saint-Ouen-l’Aumône ça aurait été quelque chose de bien mais jamais aller plus haut sans centre de formation, et avec tous les refus et blessures.

Finalement j’ai passé 13 ans à Saint-Ouen-l’Aumône, et à mes 17-18 ans j’étais courtisé par l’équipe première où je m’y entrainais et où ils attendaient mes 18 ans pour m’y intégrer. J’étais un bon joueur mais joué en CFA2 en région parisienne quand on fait dans les 1m70, c’est difficile. Pendant ce temps-là, je passe mon Bac S puis rejoint une prépa kiné, et je suis convoqué pour faire des tests pour la Nike Academy en Angleterre. Je fais partie des 40 derniers français et ils en prenaient 6 mais je ne suis de nouveau pas pris.

Suite à cela, je suis contacté par une organisation qui n’existe plus, qui m’avait vu à la Nike Academy et pensait que je pourrais aller jouer aux États-Unis avec une bourse universitaire. J’accepte, et je suis convoqué à Clairefontaine avec d’autres joueurs français. Ce n’est pas la même atmosphère, cette fois-ci on n’est pas évalué pour être le meilleur joueur mais en fonction des besoins des équipes. Et après cela après avoir reçu des demandes, je choisis de m’engager pour un club de Kansas City à Midamerica Nazarene.

Tu auras donc passé 4 années aux Etats-Unis en football universitaire de 2011 à 2014 en plus des études, comment c’était ?

Je suis parti comme cela du jour au lendemain, je n’avais jamais quitté mes parents, et ils m’ont laissé m’envoler pour la belle opportunité. Tout s’est très bien passé niveau football, grâce à cela j’ai repris du mordant et des objectifs niveau footballistique. J’ai joué avec des joueurs venant du Brésil à Fluminense/Sao Paulo, de Belgique, d’Angleterre,… qui forcément sont passés un peu à côté et n’ont pas signé pro, mais qui se retrouvent à jouer en championnat universitaire avec moi. Il y avait du niveau, mais je ne me suis pas senti en dessous, ayant été plusieurs fois dans l’équipe type du championnat puis dans le XI type de toute l’Amérique et ayant même disputé un quart de finale national. Les études cartonnaient également où j’ai eu mon diplôme de business, et au final j’ai quitté ces 4 années aux E-U en étant le joueur le plus décoré de toute mon université.

Aurelien Norest durant ses années de footbballeur universitaires aux E-U. Crédit photo : MNU Sports.

Pendant ces années, je ne savais pas qu’il y avait un championnat petites universités où j’étais, et grosses universités bien plus exposées avec des grands stades, droits TV,… ce qui serait mieux. Et justement en fin de 2e année, il y a des rumeurs comme quoi le Sporting Kansas City en MLS me suit avec la présence du recruteur à mes matchs. Tout le monde me dit que je vais être drafté, mais mon entraineur la joue bien et joue sa carte en me disant que si je vais ailleurs je peux obtenir quelque chose ou aussi bien recommencer tout à zéro dans une nouvelle université.

Je suis finalement resté, toujours suivi, et arrivé au moment de la draft en 4e année, j’entends dire qu’ils avaient préféré prendre un autre joueur qui avait la nationalité américaine contrairement à moi, qui était plus costaud en gabarit et qui jouait en championnat de grosses universités. J’ai aussi joué en semi-pro, puisque quand on joue en université, de mai à août il y a un championnat appelé la Professional Development League, où tous les meilleurs joueurs universitaires se retrouvent là-bas dans des équipes pour attirer des recruteurs. Moi j’ai joué en Californie au Southern California Seahorses, puis au FC London au Canada.

« […] de nouveau le problème de taille fait tâche »

Dommage pour la MLS, mais je me dis pourquoi pas la NASL au niveau en dessous où j’ai fait des essais, mais de nouveau le problème de taille fait tâche. Après c’était l’excuse du problème du VISA à payer. C’est là que je me suis dit que les Etats-Unis c’était fini. J’ai 22 ans, mon VISA expire, soit je reste là-bas pour travailler avec la belle vie ou alors je bouge un peu pour trouver un contrat de football. J’ai dit non je suis bien au niveau footballistique, c’est vrai qu’il est un peu tard mais pourquoi pas commencer quelque chose. Je suis donc parti des Etats-Unis, pour le Canada où je travaillais je coachais, m’entrainer,…

Tu as ensuite réussi à réaliser ton objectif de devenir pro dans le foot en rejoignant nos pays nordiques en D3 Islandaise à Vestri Isafjördur puis depuis désormais 1 an et demi la Suède à Umea en D3 aussi, comment cela s’est fait et s’est passé ?

J’entendais parler d’un recrutement aux États-Unis mais pour envoyer des joueurs en Europe sous la société Soccer Visa. Je vais là-bas cela se passe bien, et j’ai un appel du coach de Vestri en D3 Islandaise. Il me dit que je l’intéresse et que je contrôle bien le jeu de derrière en défense centrale, et qu’il veut que je les rejoigne mais il faut que je vienne sur place car le coach assistant et le président veulent me voir sur le terrain. Je dis non, que ça va me coûter un bras pour une D3 en Islande devoir faire un essai alors que lui m’avait vu 3 jours à l’évènement. Ils me disent alors qu’il y a 3 joueurs qui pourraient être pris à ma place, mais leurs essais sont finalement catastrophiques. Je suis donc pris en Islande sans essai en signant mon premier contrat professionnel et en étant pour la première fois rémunérée par le football.

Aurelien Norest sous le maillot de Vestri en D3 islandaise, situé dans les fjords du nord-ouest. Crédit photo : Instagram joueur.

Première saison ça se passe bien, je suis en Islande, je suis payé avec le foot et j’ai un petit boulot à côté dans cette ville de 1 500 habitants, je suis content. Je savais qu’en partant en Islande je devais faire un travail sur moi-même et je voyais toujours sur le long terme. C’est pour ça que j’ai toujours voulu avoir un boulot à côté, en négociant mon contrat j’ai la somme que je veux mais je demande toujours à avoir un boulot car je ne pourrais pas accepter de rester chez moi. Désormais je travaille dans un Barber Shop tous les jours et ça se passe très bien. J’ai besoin de me lever le matin et avoir un but.

Ils me proposent de revenir pour une seconde saison et je décide d’y retourner où je suis passé capitaine mais rien ne bouge et les résultats ne suivent pas, j’ai donc envie de partir pour changer d’air. J’essaye de voir pour autre chose et je décroche un essai en Australie à Melbourne. Mais en arrivant : pas de coach. Et après 24H d’avion, ils me font directement un fitness test de malade. Entrainements intensifs, boom je me blesse sur place aux ischios. Mais ils me forcent à jouer en match 4 jours après m’avoir vu à l’entrainement. Je fais donc un aller-retour de 48H très rapidement, et je décide de rentrer en France.

C’est alors que j’ai un agent qui me propose de partir en Suède à Syrianska, c’était l’année dernière et ça ne s’est toujours pas bien passé. Personne pour me récupérer à l’aéroport, je roule ma valise sur le terrain par exemple, bagarres au sein de l’équipe et du stade, joueurs pas payé,… Heureusement point positif on affronte Djurgarden (club de D1) en amical et je fais un bon match. Et le coach de Umea avait joué dans ce club en tant que joueur, donc il suivait le match et il s’est au final renseigné sur moi et a vu que j’avais déjà joué avec un joueur de son équipe.

Il m’a demandé si j’étais intéressé et j’ai dit oui sortait moi de cette galère, du coup cela s’est fait. Mais cette fois on m’a placé comme milieu défensif durant toute la première saison et pour la seconde je suis resté au club avec un poste plus intéressant comme capitaine. Cela se passe bien, et suite aux problèmes défensifs et suspension je suis redevenue défenseur central depuis.

Vidéo des highlights de la saison 2018 en Suède d’Aurélien Norest, qui publie chaque année environ une vidéo résumé de sa saison sur sa chaîne YT.

Tu es en fin de contrat à la fin de l’année, en fonction d’une montée cela conditionnerait ton envie de rester où tu as des envies d’ailleurs plus haut en Suède ou à l’étranger ?

Mon club m’a convoqué pour l’année prochaine, car je ne signe jamais de longs contrats. Et je suis sûr de ce que je veux donner au club, je suis moins sur de ce qu’ils vont m’apporter. Si je leur donne ce qu’il faut, ils me reproposeront une prolongation.

Alors si l’on reste dans la même division, ils veulent que je reste, et si on monte ils veulent que je reste également et comme capitaine. C’est quand même une belle preuve de confiance pour un petit français en Suède. En espérant qu’on fasse le boulot et qu’on monte, on va pousser et ça va aider ma décision si on franchit cette belle étape.

À 3 journées de la fin, à la publication de l’article, le club d’Aurelien Norest, est pour l’instant barragiste pour une éventuelle montée en seconde division suédoise, la Superettan. Crédit : page Soccerway.

Tu as entrainé des groupes de jeunes à plusieurs reprises durant tous tes passages dans des clubs, c’est ce que tu souhaiterais faire à pleins temps après la fin de ta carrière ?

J’ai mon diplôme en business administration acquit aux Etats-Unis, je suis un barber/coiffeur connu dans la ville, comme je dis je suis toujours ouvert à tout, quelque chose que je puisse faire et maitriser pour moi c’est un atout et c’est une nouvelle corde à mon arc. Je pense que le coaching peut être quelque chose d’intéressant pour moi, après c’est comme tout il faudra voir où le football va m’emmener. Je pense que plus ta carrière est intéressante plus ça peut t’aider, mais bien sûr si une opportunité se présente je prendrais.

À la fin de ma carrière on m’a conseillé de faire joueur-entraineur, étant perçu comme quelqu’un de confiance, je pense que je peux manier une troupe comme l’histoire du brassard dans ma carrière. J’ai déjà coaché des jeunes et des 15-18 ans en France, aux Etats-Unis et au Canada. L’aspect tactique et surtout psychologique des footballeurs et comment manier leur mentalité, faire attention quand il faut pousser ou ralentir un petit peu, c’est quelque chose de très intéressant selon moi et qui me plairait à mettre en place.

Pour finir, que peux-tu conseiller après tes expériences personnelles acquises, à des jeunes français qui aimeraient se lancer dans l’aventure de devenir professionnel à l’étranger comme tu as pu le faire à ta majorité et qu’est-ce que ça t’a apporté footballistiquement et personnellement ?

Tout d’abord ça doit être une passion, quelque chose qui te donne le sourire. Comme je le dis à tout le monde quand on me demande pourquoi tu joues en Suède en 3e division, pourquoi ça te motive ? Le matin quand je me lève je pense qu’il y a le boulot mais ça ce n’est rien, c’est le football qui me motive et me fait sourire avec l’entrainement de l’après-midi, j’ai envie de taper le ballon et de construire quelque chose de nouveau avec mon équipe.

Faut qu’ils se demandent d’abord est-ce que c’est quelque chose d’important pour moi ? Si tu n’es pas heureux et que ça te gonfle de courir 2 heures sur un terrain, et que tous les jours quelqu’un te disse comment faire, d’être dans un groupe avec différentes personnalités,… faut faire quelque chose d’autre car c’est ça le football. Et bien sûr quand on s’engage pour moi, la clé de tout c’est l’éducation, le respect que l’on donne aux autres et deuxièmement la détermination.

Malgré tout comme je l’ai dit j’ai été un peu malchanceux de ce côté-là car j’ai toujours été un joueur d’équipe. Je pense que je suis arrivé là où j’en suis, qui attention n’est rien du tout en termes de football, il y en a des milliers de championnats, et je fais partie de la 3e division suédoise, mais je pense que ma rigueur et ma détermination m’ont permis d’en arriver là. Car on va dire que j’ai commencé mon chemin footballistique à 22-23 ans à la fin de mon université, et désormais à 27 ans et en être là en 3e division suédoise en étant capitaine et avoir un contrat c’est quand même intéressant. Et tant que je souris, le parcours n’est pas terminé et tout peut encore arriver !


Un grand merci à Aurelien Norest pour sa gentillesse et son ouverture, de nous avoir raconté en détail son parcours jusqu’à aujourd’hui. Nous lui souhaitant une belle fin de saison avec on l’espère la montée au bout !

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