À l’heure où la crise énergétique bat son plein et où le football nécessite toujours de plus en plus d’argent pour performer au haut-niveau, les clubs norvégiens sont de plus en plus tentés et sujets aux changements du « football moderne ». Retour sur la polémique du Marienlyst Stadion qui a fait grand bruit dans la ville de Drammen auprès des supporters de Strømsgodset.

La polémique

Le 16 décembre dernier, la municipalité de Drammen a autorisé pour la toute première fois le changement de nom des installations municipales de la ville. Cette décision a pour conséquence directe le fait que le stade dans lequel évolue Strømsgodset, le Marienlyst Stadion, puisse être sponsorisé et change donc de nom à l’instar de la Consto Arena à Mjøndalen ou de la SR-Bank Arena pour Viking.

Rapidement, les supporters ont décidé de prendre les devants car cette possibilité est loin d’être imaginaire. En Norvège, de nombreux clubs ont eu recours à cette pratique, à l’image de Mjøndalen et Viking comme cités précédemment, mais aussi de Vålerenga avec l’Intility Arena, Odds avec la Skagerak Arena et cætera. Il est vrai que c’est un sujet sensible pour tous les amoureux de football, mais c’est aussi un sujet complexe.

Une polémique qui cache un problème plus large

Le football a toujours été un reflet de la société et dépasse même les frontières du sport. Nous avons d’autant pu le remarquer ces dernières années avec le sportwashing, procédé qui permet à une personne, à une entreprise, ou à une nation de redorer son image grâce au sport, mais aussi par les tensions géopolitiques avec notamment la guerre entre l’Ukraine et la Russie. Nikita Haikin, ancien gardien de Bodø/Glimt d’origine russe, avait dû s’exprimer à plusieurs reprises sur ses réseaux sociaux ou par des actions sur le terrain, comme s’il avait à se justifier.

Nikita Haikin à l’échauffement lors du match Bodø/Glimt – Alkmaar Zaanstreek avec un maillot contre la guerre entre l’Ukraine et la Russie.

Mais ces dernières années le football devient de plus en plus gangréné par l’argent, nous avons pu le voir avec le changement de diffuseur vers TV2 où l’abonnement pour suivre les matchs d’Eliteserien augmentera de 123% ! En parallèle, les difficultés économiques se sont multipliées et encore plus récemment avec la crise énergétique. Alors entre histoire ou argent, que choisira Strømsgodset ?

Du point de vue des supporters, il est hors de question de renommer le Marienlyst Stadion. L’argument historique est mis en avant ici, car le stade a toujours eu ce nom, avant même que le club norvégien ne s’y installe en 1967. En effet, changer son nom contre de l’argent serait équivalent à vendre son histoire et une partie de son identité selon eux. Les dirigeants du club norvégien l’ont eux-mêmes déclaré : “Chez Strømsgodset, nous n’avons jamais discuté de cela en détail. Premièrement, nous ne sommes pas propriétaires du stade, et deuxièmement, nous qui dirigeons ce club sommes avant tout des supporters et des fanatiques qui cultivent l’histoire, la culture et la tradition du club.”

De plus, les supporters expriment un manque de soutien de la part de l’État, qui s’enrichit de jour en jour grâce au pétrole, mais qui n’aide pas ou trop peu les structures. Ainsi, ce dernier a réagi et propose un plan de subventions pour aider les clubs face à la hausse du prix de l’électricité. Mais est-ce que ça sera assez ? Rien n’est moins sûr, d’autant plus que la fédération elle-même ne peut qu’aider partiellement les clubs suite à leur grand investissement dans la VAR qui coûterait entre treize et dix-huit millions de couronnes chaque année (~1.1 million € – 1.6 million €).

Les supporters de Strømsgodset, Godset Unionen, lors d’un match à domicile au Marienlyst Stadion

Cependant, d’autres raisons pourraient faire pencher la balance. Le naming du stade rapporterait à la ville de Drammen 50 000€ en 2023 puis 150 000€ par an à partir de 2024. Une rentrée d’argent qui serait bien accueillie par la ville qui a dû revoir à la baisse ses subventions pour ses lieux culturelles en 2022, ce qui a eu comme conséquences de nombreux licenciements. De plus, pour Herman Ekle Lund, vice-président de la grande commission de la culture, du sport et du volontariat de Drammen, ces rentrées d’argent seraient très utiles au développement d’emploi pour les personnes handicapées et baisseraient significativement le coût de fonctionnement du Marienlyst Stadion. Le dernier argument avancé est que grâce à l’argent que cela pourrait générer, la ville serait en mesure de développer « le bien-être et de proposer des aides aux habitants en difficultés. »

L’argent pourrait aussi être investi dans la formation et le développement des infrastructures des jeunes joueurs, ce qui pourrait être bénéfique à long terme. De plus, une nouvelle entrée d’argent permettrait au club de trouver une solution alternative à son terrain synthétique, car à partir de 2026, ces terrains ne seront plus autorisés pour des raisons écologiques. Si le club doit installer une pelouse naturelle, elle coûterait extrêmement cher à l’entretien.

Dans tous les cas, la décision de renommer ou non le Marienlyst Stadion ne viendra pas de Strømsgodset mais de la ville elle-même. C’est cette dernière qui est propriétaire du stade et non le club norvégien.

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