« Le Roi est empereur en son royaume », tels étaient les mots de Philippe Auguste il y a de cela 700 ans, mais cette célèbre phrase est restée et semble illustrer parfaitement le statut de Zlatan Ibrahimovic avec la sélection Suédoise. 5 ans après l’annonce de sa retraite internationale, celui que l’on surnomme « le Z » avait annoncé le 16 mars dernier, sa décision de sortir de cette dernière, dans un style… bien à lui. Mais alors que les blågult (Bleu et Jaune, surnom de la sélection Suédoise) sortent d’une longue phase de reconstruction post Zlatan, le voilà catapulté dans un nouveau groupe avec un nouveau dispositif et un nouveau style de jeu. Toutes ces nouveautés ont-elles changé la donne où Zlatan est-il encore empereur en son royaume ? C’est ce que nous allons tenter d’éclaircir. 

Une ombre planante sur la sélection

Si le ciel de Gotham City voit planer l’ombre de Batman, il est certain que le ciel suédois voit l’ombre de Zlatan planer au-dessus de sa sélection. S’il en est le meilleur buteur avec 62 réalisations en 120 apparitions et dieu sait qu’il a gratifié le football de véritables bijoux, ce qui fait de Zlatan un personnage si particulier, c’est son côté fantasque et sa confiance inébranlable. Il est de ceux qui ont façonné la SvFF (Svensk FotballFörbundets, le nom de la Fédération Suédoise de Football) du début du millénaire, de ceux, avec Johan Elmander et Kim Kallström, qui peuvent dire avoir laissé une trace dans le jeu des blågult d’aujourd’hui. Il serait mentir que de dire que lorsque l’on évoque la sélection  suédoise, le premier nom qui nous vient à l’esprit n’est pas celui de Zlatan tant son impact sur ce petit pays de football est immense. Tout le monde se souvient, de lui comme d’un gagnant, d’un buteur exceptionnel et qui portait son équipe, de son retourné acrobatique à 35 mètres des buts contre l’Angleterre où de ses célébrations iconiques. Malgré des résultats en sélection pas toujours convaincants, il est érigé en roi du football suédois et s’autoproclame même Dieu.

C’est dire le poids qui repose sur les épaules de Janne Andersson, sélectionneur de la SvFF depuis 2016 : Comment faire retrouver à cette sélection un second souffle, un nouvel élan post Zlatan avec pourtant l’ombre de cette légende au-dessus de leurs têtes. Bien que l’on puisse critiquer à juste titre le jeu proposé par Janne depuis son intronisation à la vue du vivier de joueurs dont il peut disposer. Force est de constater qu’il à permis à la Suède de réaliser un beau résultat lors de la Coupe du Monde 2018, échouant aux portes de la demi-finale en s’inclinant contre les Anglais. La Suède semblait peu à peu trouver un nouvel élan sportif, à l’aube des qualifications pour la Coupe du Monde 2022.

Kim Källström et Zlatan Ibrahimovic avec la SvFF en 2015

Un retour annoncé mais qui se fait attendre

« Le retour de Dieu » Tels étaient les mots de Zlatan Ibrahimovic, le 16 mars 2021 pour annoncer son retour en sélection, 5 ans après sa dernière apparition. La Suède dispute alors les qualifications pour la Coupe du Monde 2022, et est en concurrence directe avec l’Espagne pour la première place du groupe tandis que l’Euro approche. Une annonce inattendue qui vient bouleverser le système établi depuis sa retraite internationale 5 ans plus tôt. Sans surprise, Janne Andersson ne peut faire autrement que de convoquer le meilleur buteur de l’histoire de la sélection. Mais, le retour d’Ibra en sélection se fera finalement attendre puisqu’il doit déclarer forfait en raison d’une reprise athlétique plus longue que prévue après sa rupture des ligaments croisés. Bien que l’on puisse nourrir des regrets de l’absence du Z, la sélection elle, forte de 5 ans de reconstruction sait faire et bien faire sans lui. Alors les résultats de la SvFF suivent : leaders de leur poule de qualifications à la coupe du monde puis premiers de leur poule à l’Euro, les résultats sont convaincants, avant de finalement trébucher contre l’Ukraine en 16es. Vient alors novembre et la Suède n’a plus que deux petits matchs à jouer pour tenter de  se qualifier au mondial 2022, Zlatan, de retour de blessure et buteur régulier avec l’AC Milan est de retour et cette fois pour de bon dans le groupe suédois. 

Et plus que compliqué sur le terrain.

La SvFF est alors en position d’assurer sa participation à la prochaine compétition internationale en cas de victoire contre son premier adversaire : la Géorgie, qu’ils avaient battus lors du match allé en aval du match face au Kosovo signant le grand retour du Z. C’est le même groupe qui à participé à l’entièreté des phases de qualification -à l’exception d’Ibra- qui est convoqué pour la terminer. Logique lorsque l’on sait et que l’on à suivi les années compliquées sportivement pour la sélection après Zlatan. A la surprise générale, Janne Andersson titularise Zlatan en pointe de l’attaque aux côtés d’Alexander Isak aux dépens de Dejan Kulusevski ou Robin Quaison. Pourtant coutumiers de ce poste, du nouveau système de jeu proposé par les blågult, tous deux laissent leur place à Ibra qui n’a disputé que deux petits matchs aux côtés du buteur de la Real Sociedad. Si sur le papier ils semblent être plus rôdés pour jouer aux côtés d’un Isak, Andersson leur préfère Zlatan et son profil atypique. Pourtant, en Suède, d’un point de vue médiatique, cette association entre deux joueurs qui n’ont disputé que 180 minutes ensemble, dans un match à l’ importance significative, semble être un coup de maître face à un adversaire prenable. 

Alors, il est inutile de vous raconter ce match, tant vous comprendrez le scénario : une première mi-temps maîtrisée avec des occasions mais aucun but. Une contre attaque adverse et vous êtes à peu d’en prendre un juste avant la mi-temps. Une deuxième mi-temps brouillonne avec un Zlatan qui veut prendre le jeu à son compte mais qui multiplie les hors-jeux et coups francs envoyés sur l’ISS… Une première contre attaque adverse, vous encaissez le premier but et derrière, galvanisés par un public en feu derrière eux, des Géorgiens qui plient le match (2-0 score final). 

Ce match pose la question phare de cet article : Zlatan est-il encore empereur en son royaume ? Et bien, rien n’est binaire -désolé Orelsan- concernant Zlatan, il est impossible de répondre oui ou non, la réponse se trouve dans un entre deux. Car bien qu’il est indéniable de dire qu’il aura laissé une trace indélébile sur le jeu de la SvFF, la preuve étant sa convocation et sa titularisation dès son retour malgré tous les changements opérés dans le jeu de la sélection. Force est de constater que son énième retour est plus compliqué que les autres. Si l’âge est un facteur à prendre en compte, il est obligatoire de dire et de constater que l’impact de Zlatan chez les blågult n’est ni celui d’antan,  ni celui qu’il peut avoir au Milan. Systématiquement à contre-temps, annihilant des occasions avec des errements dans le placement, multipliant les pertes de balles et coups francs dans les tribunes… Il n’y était pas face à la Géorgie, et n’y était pas non plus face à l’Espagne. Cette fois-ci remplaçant, il est entré en cours de jeu ( à la 73e en lieu et place d’Alexander Isak), il n’a pas permis à la Suède de faire la différence et à vu son équipe s’incliner.

Dans le même temps, lui prenait un carton jaune en toute fin de match après un violent geste qui aurait pu lui valoir un rouge. Un carton qui lui vaut de toute manière une suspension pour les demies-finales de barrages pour le mondial. Zlatan manquera donc le match aller des barrages… venant alourdir une fois de plus le tableau que l’on peut dresser contre son retour en sélection. Car bien que les légendes ne meurent jamais, et il l’aura montré en revenant de deux ruptures des croisés,  il semble inévitable que de confesser que le temps d’Ibra en sélection est révolu. La Suède avait réussi à retrouver des couleurs sur le plan sportif depuis son départ, mais son retour semble faire retomber la SvFF dans ses travers d’antan… tout en sacrifiant la montée de joueurs prometteurs plus adaptés au système comme Victor Gyökeres, le jeune buteur de Coventry City qui lui a dû céder sa place dans le groupe à celui qui s’autoproclame Dieu du football suédois.

Alors que la Suède devra donc retrouver ses esprits pour se qualifier pour le mondial 2022, faudra-t-il donner une seconde chance à Zlatan de prouver que son retour en sélection n’est pas seulement un coup médiatique et mercantile ? Là dessus, il semble que Janne Andersson soit enclin à donner à celui qui a inspiré plus de la moitié des aspirants internationaux suédois, le temps de s’adapter à ses nouveaux coéquipiers, au nouveau système et à son nouveau rôle. En Suède, les doutes commencent à s’élever quant à la nécessité de son retour et à l’impact qu’il peut avoir sur le jeu de la sélection qui semblait peu à peu progresser vers de meilleurs jours, grâce à un vivier qui ne cesse de progresser au fil du temps. S’offrira-t-il une dernière danse au mondial 2022 ou finira-t-il sa carrière à Hammarby comme il était possible de le comprendre entre les lignes de ses déclarations en conférence de presse, seul l’avenir nous dira s’il est encore un empereur en son royaume où si les rênes de la sélection ont définitivement changé de mains. Une chose est sûre, Zlatan sera toujours, dans les livres d’histoire du football suédois et dans les esprits, l’un des très grands.

Par Nino Bourge Maldinez – @Nino_mldz.

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