Outre la possibilité de faire d’énormes progrès en géographie, les footeux de plus de 40 ans ne le nieront pas, les soirées européennes avant 1992 possédaient un parfum particulier. Une période où Dame Europe était moins sensible à l’appel du gain et plus ouverte à découvrir des destinations improbables. Cela par des matchs aller-retour, couperets, à la vie à la mort, où n’importe quel grand européen pouvait se retrouver dès septembre hors course. Soit par un autre de son standing, ou par un club dont la participation à une coupe d’Europe était synonyme d’événement majeur, avec l’occasion d’enflammer sa ville, sa région, voire même en cas d’épopée, son pays. Et ainsi de se mettre en lumière, le temps d’un printemps devant les yeux de l’Europe entière et d’endosser le rôle du club sympa qui prête à faire sourire les grosses écuries. Un peu moins quand il prend plaisir à revenir les titiller. Avant d’inspirer du respect, puis de la crainte quand celui-ci s’invite à leur table.

L’IFK Göteborg sera pendant près de 20 ans un des plus beaux exemples, parmi d’autres de ce genre de club. Notamment durant les années 80, avec l’évolution d’un groupe dont il est principalement sujet ci-dessous. Déjà, Malmö avait en 1979, failli gagner le Graal suprême en participant à la finale de la Coupe des Clubs Champions. Mais le Nottingham Forest de Trevor Francis et Brian Crough empêcha le club suédois d’être couronné. L’IFK lui aussi ne parviendra pas à remporter le plus grand trophée européen. Mais qu’importe. Au final est-ce cela le plus important ? En l’espace de 10 ans, ce club semi pro (le club remboursant  aux joueurs les heures perdues au travail) commença une aventure qui le mènera de la seconde division suédoise aux plus hautes joutes européennes. Avec des quarts de finales, demi-finales et comme point d’orgue bien sûr, deux finales disputées et… gagnées. Une compétition, la Coupe UEFA qui à l’époque, de par le nombre de représentants par pays, était plus difficile à remporter qu’une Coupe des Clubs Champions ou Coupe des Coupes qui elles, n’en comptaient qu’un (hormis le vainqueur).


1976-1981 : la reconstruction

De la Södra….

L’IFK en 1976

Avant de se faire un nom sur la scène européenne, l’IFK Göteborg est en ce début d’année 1976 coincé depuis plusieurs saisons stériles dans l’antichambre de l’Elite (divisée à l’époque en 2 poules, Södra et Norra respectivement Sud et Nord). Ces années difficiles sont symbolisées par l’instabilité d’un effectif qui ne se trouve pas. On comptera pas moins de 34 recrues en 3 ans. Le club dont le dernier titre national remonte à 1969, confie alors l’équipe à Nils Berghamn, en provenance de Jonsered. Berghamn pourra s’appuyer sur l’expérience de deux internationaux, figures majeures du football suédois de l’époque. D’abord Ove Kindvall, vainqueur de la C1 avec le Feyenord, celui-ci est venu s’offrir un dernier challenge à Göteborg. Mais également Björn Nordqvist, plus de 100 sélections sous le maillot Blågult ainsi qu’un jeune milieu de terrain qu’il connait bien puisque formé au même endroit, Torbjorn Nilsson.

Les résultats sont immédiats. Avec pas moins de 20 victoires, 4 nuls pour seulement 2 défaites, l’IFK termine premier avec 8 points d’avance sur Helsingborg. L’équipe marquera pas moins de 68 buts en seulement 26 matchs symbolisés par le titre de meilleur buteur pour Nilsson. L’engouement de la ville pour le football est tel qu’un nouveau record a été établi pour le football suédois de deuxième division lorsque 50 690 personnes assistent à Ullevi au derby local GAIS – IFK, victoire 1-3 (le match retour gagné aussi par l’IFK 3-0, se fera lui devant plus de… 30 000 personnes). Cela donnera une belle visibilité des joueurs vis à vis de l’étranger ,à l’image de Nilsson, qui tentera sa première expérience à l’étranger en signant au PSV Eindhoven.

… à l’Allsvenskan

Pour son retour en Allsvenskan, l’IFK est désormais coaché par Hans Karlsson. Coté recrutement, le club se renforce avec l’international Ralf Edström et Glenn Holm. Mais aussi deux garçons qui marqueront le succès du club, les frères Holmgren, Tommy et Tord, et s’ajoute également le retour en juillet des Pays-Bas d’un Nilsson fragilisé mentalement. Un passage au PSV, où le suédois avouera vouloir se cacher sur le terrain et être remplaçant. L’IFK obtient une encourageante 6place pour son retour dans l’élite avec un Reine Almqvist meilleur buteur avec 15 buts.

Kindvall, lui, prend sa retraite après un passage ponctué par 30 buts en 58 matches de série pour l’IFK. Il deviendra manager du club. Autre signe d’encouragement, le public gothembourgeois. Une moyenne de… 24 000 spectateurs pour les 13 matchs de championnat. En 1978, Glenn Hysen perpétue la tradition familiale en signant au club (son père, son grand père et son grand-oncle portèrent les couleurs bleus et blancs). L’IFK continue sa montée en puissance avec une 3e place. Reine Almquist est encore le meilleur buteur du club avec 11 réalisations. À noter aussi que le club possède les meilleures affluences du championnat avec comme point d’orgue, la réception de l’IF Elfsborg (victoire 1-0) avec plus de 32 000 personnes.

À l’entame de la saison 1979, Sven-Göran Eriksson tout jeune retraité remplace Karlsson dans le rôle de manager. Ce nouveau coach sort d’une expérience à Degerfors IF, avec qui il est monté de D3 à l’élite en 2 ans. Son arrivée ne fit pas l’unanimité. Par exemple, Ove Kindvall ne fut pas convaincu de la décision prise par le conseil de recruter Eriksson. Ove avait même fait activer son réseau des Pays-Bas pour trouver un remplaçant. Autant dire que la prévision d’un succès fut incertaine.

Eriksson va alors introduire un nouveau dispositif tactique qui sera sa marque de fabrique : le 4-4-2. Défense en ligne, «pression et soutien», peu d’espaces dans les intervalles, utilisation de l’attaque sur la largeur du terrain. Bien que ce système soit contesté, il va permettre à l’IFK de monter d’un cran. Dès sa première année à la tête de l’IFK, l’équipe se classe deuxième du championnat derrière Halmstad BK et remporte sa première coupe de Suède en battant 6-1 Åtvidabergs FF.

La coupe de Suède, le début d’une longue aventure

Torbjörn Nilsson deviendra le symbole du nouveau style imposé par l’entraîneur suédois, en s’affirmant comme le patron de ce jeu plus attractif, collectif et offensif, avec une maturité sur et en dehors du terrain. Sa montée en puissance dans le jeu correspondra à celle du club. Nilsson reconnaitra plus tard l’importance de Sven-Göran Eriksson dans sa carrière. Ce dernier avouera de son côté que Nilsson fut le joueur le plus talentueux qu’il aura coaché. D’ailleurs il tentera de le faire venir dès son arrivée au Benfica en 1982. Mais Nilsson préféra plutôt partir tenter l’aventure au Kaiserslautern. Ce respect mutuel resurgit quand Nilsson prit la place d’adjoint d’Alf Westerberg à l’IFK à la mi-saison passée. Eriksson, resté très attaché au club et alors sans emploi se vit poser la question lors d’une interview sur une éventuelle collaboration des 2 hommes à la tête du club. Doux rêve qui ne vit pas le jour.

Le retour sur la scène européenne en 1980 sera ponctué par un 1/4 de finale de la C2, qui vit les suédois tomber face à Arsenal (5-1, 0-0) après avoir éliminé Waterford et le Panionios. La saison suivante en Coupe d’UEFA sera éphémère. Jouer un club hollandais à l’époque n’était pas chose facile et le FC Twente éliminera nos suédois (1-5, 2-0). En championnat, Håkan Sandberg tout comme le gardien de l’équipe nationale islandaise Torstein Olafsson ont rejoint le club. L’IFK termine 3e et confirme son retour dans le haut du tableau.

Printemps 1981, l’équipe est renforcée avec plusieurs bons joueurs, dont Glenn Hysén, Glenn Strömberg, le gardien Thomas Wernerson, Stig Fredriksson et Gunder Bengtsson comme nouvel adjoint d’Eriksson. Le début de saison est très compliqué. Sous pression, lors d’une séance d’entraînement à Kamratgården, Svennis rassemble ses joueurs.

– « Pensez-vous que ce soit ma faute si nous jouons mal ? Voulez-vous que je parte?»
– «Non», répondent les joueurs. «C’est autant notre faute.»
– «Bien» conclut Ericksson.

Eriksson, fait rebondir ses joueurs pour la première fois depuis son arrivée. La tendance s’inverse et Göteborg termine deuxième derrière Östers IF avec la meilleure attaque (60 buts). Torbjörn Nilsson avec 20 buts est le meilleur buteur de la compétition. Sur la scène européenne, l’IFK passe une nouvelle fois l’hiver en atteignant une nouvelle fois les quarts de finale mais de la Coupe UEFA cette fois-ci en éliminant tour à tour Haka Valkeakoski, le Sturm Graz et le Rapid Bucarest.

Néanmoins de sérieux problèmes économiques apparaissent, ce qui conduira à des tensions au sein du conseil d’administration.


Demain : Episode 2 – 1982, de la faillite imminente au toit de l’Europe

Laisser un commentaire